Oscar Wilde


Le portrait de Dorian Gray



Après une première version publiée dans un magazine en 1890, le roman paraît l’année suivante. Oscar Wilde y raconte comment Dorian Gray, jeune aristocrate anglais, dont Basil Hallward vient de terminer un portrait, exprime le vœu de voir le portrait vieillir à sa place. Au fil des ans et des fautes, le tableau s’enlaidit tandis que Dorian Gray conserve sa jeunesse et sa beauté. Découvrant sur le portrait la noirceur de son âme, il finit par se poignarder en croyant détruire le tableau.


Une première version en magazine

Au cours d’un dîner, durant l’été 1889, le responsable d’un mensuel proposa à Arthur Conan Doyle et Oscar Wilde de collaborer à son magazine. Le premier fournit Le signe des quatre (deuxième apparition de Sherlock Holmes) qui parut en février 1890 et le second donna une première version du Portrait de Dorian Gray qui fut publiée en juin 1890. Oscar Wilde remania ensuite son texte, y ajoutant six nouveaux chapitres, avant de le faire paraître en volume en avril 1891 avec une préface constituée d’aphorismes.

Oscar Wilde et Dorian Gray

Dans une lettre, Oscar Wilde précise qu’il ne s’identifie à aucun personnage en particulier : « ce roman d’étrange apparence […] contient beaucoup de moi-même. Basil Hallward est ce que je crois être ; Lord Henry, ce que le monde me croit ; Dorian ce que je voudrais être – en d’autres temps, peut-être ».

Oscar Wilde et l’art

Aphorismes extraits de la préface :
Tout art est à la fois surface et symbole. Ceux qui dépassent la surface le font à leurs propres risques. Ceux qui déchiffrent le symbole le font à leurs propres risques.
C'est en réalité le spectateur et non la vie que reflète l'art.
Des opinions différentes au sujet d'une œuvre d'art montrent que cette œuvre est neuve, complexe, vitale.
Quand les critiques ne sont pas d'accord entre eux, l'artiste est en accord avec lui-même.
On peut pardonner à un homme d'accomplir une œuvre utile à condition qu'il ne l'admire pas. La seule excuse d'une œuvre inutile, c'est qu'on l'admire intensément.
Tout art est complètement inutile.



Quelques extraits

« Comme c'est triste ! murmura Dorian Gray, les yeux toujours fixés sur son propre portrait. Comme c'est triste ! Je deviendrai vieux, horrible, hideux. Mais le portrait restera toujours jeune. Il ne sera jamais plus vieux qu'il ne l'est en ce jour de juin... Si seulement c'était le contraire ! Si c'était moi qui restais toujours jeune et que ce fût le portrait qui vieillît ! Pour cela... Pour cela je donnerais n'importe quoi. Oui, il n'y a rien au monde que je ne donnerais ! Je donnerais mon âme pour cela ! »

« Je suis jaloux de tout ce dont la beauté ne meurt pas. Je suis jaloux du portrait que tu as peint de moi. Pourquoi gardera-t-il ce que je dois perdre ? Chaque instant qui passe me prend quelque chose pour le lui donner. Oh ! si seulement c'était le contraire ! Si le tableau pouvait changer tandis que je resterais ce que je suis ! Pourquoi l'as-tu peint ? Un jour il me ridiculisera, il me ridiculisera horriblement ! »

« Ayant retiré la fleur de sa boutonnière, il sembla hésiter. Enfin il retourna examiner le tableau. Dans la lumière terne, atténuée, qui arrivait à filtrer à travers les persiennes de soie de couleur crème, le visage lui parut un peu modifié. L'expression paraissait différente. On eût cru qu'il y avait une ombre de cruauté dans la bouche. Eh oui, c'était bizarre. »

« Mais cet assassinat le poursuivrait-il toute sa vie ? Devrait-il toujours porter le poids de son passé ? Devait- il vraiment avouer ? Jamais. Il n'y avait contre lui qu'un seul élément de preuve : le tableau lui-même. Oui, c'était une preuve. Il le détruirait. Pourquoi l'avait-il gardé aussi longtemps ? Jadis, il avait trouvé du plaisir à le voir changer et vieillir. Récemment, ce plaisir, il ne l'avait plus éprouvé. La nuit, il n'en dormait plus. Absent, il était terrorisé à l'idée que d'autres regards que les siens ne tombassent dessus. Ses passions en avaient été assombries de mélancolie. Le souvenir en avait gâché bien des moments joyeux. Le portrait avait été comme sa conscience. Oui, il avait été sa conscience. Il le détruirait. »



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Le Livre de Poche offre une nouvelle version de ce roman.
Après l’édition de 1972 préfacée par Dominique Fernandez, une nouvelle édition vient de paraître avec une traduction de Vladimir Volkoff et une introduction de Jean-Pierre Naugrette.

En couverture :
Frédéric Bazille : Autoportrait (détail)






Oscar Wilde
Né à Dublin
le 16 octobre 1854
Décédé à Paris
le 30 novembre 1900